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"N'oubliez pas vos doutes... Méfiez-vous! L'esprit de celui qui croit est un esprit qui stagne. Il ne se développe pas vers l'extérieur, dans un univers infini."
Frank Herbert, Les hérétiques de Dune
AVERTISSEMENT
ATTENTION : pour des raisons probablement mercantiles visant la création d'un site payant (web) , tous les liens web avec Inforpress d'avant 2024 au moins sont désormais "morts", car l'agence de presse publique du Cabo Verde a supprimé ou rendu inaccessible ses archives online. Impossible de retrouver un article avec une URL ni même avec Google à partir du titre précis de l'article. Ce qui montre bien la volonté politique (Inforpress étant une agence de presse publique purement gouvernementale MpD, adieu la transparence), de ne pas offrir la possibilité d'une analyse de ses dépêches à travers le temps. Un exemple de la limitation de l'accès à l'information fort dommageable et critiquable pour une "agence de presse" nationale !
Pour notre part, nous éviterons désormais de renvoyer à Inforpress et, afin de garder une archive propre à notre site, nous effectuons systématiquement une capture d'écran des articles mentionnés dans nos post it, histoire de "ne pas oublier" ce qui a été dit ou écrit :-)
VIVE la VRAIE LIBERTÉ de la PRESSE !
VIVE la VRAIE DIFFUSION de l'INFORMATION !
VIVE la TRANSPARENCE !
VIVE l'OPEN ACCESS et l'OPEN SOURCE !
Pour un monde collaboratif, meilleur et libre.
Christophe Chazalon, 16/03/2025
Art en Afrique: "Voir autrement" de Maureen Murphy (2025)
Il n'est pas de coutume sur ce site de proposer des recensions ou des citations d'ouvrages, mais l'exception confirme la règle. La lecture de Voir autrement de Maureen Murphy, paru en 2022 aux Éditions de la Sorbonne, a fait tilt. Depuis le chapitre de Chris Marker intitulé « L'art noir », publié dans L'Afrique noire (Paris : Éd. Odé, 1952, p. 29-49), jamais un ouvrage ne nous avait autant plu et autant fait réagir. Pour la première fois depuis longtemps, enfin quelqu'un exprime clairement une pensée simple et logique, mais totalement ignorée, pire volontairement rejetée par les anciens pays colonisateurs de l'Empire Pax Americana, plus connus sous le nom de "pays occidentaux". Même lors de nos longues études universitaires en histoire de l'art, l'Afrique et ses 54 (ONU) ou 55 (UA) pays (casse tête du Sahara occidental oblige) étaient cantonnés à... l'histoire de l'Égypte ancienne et de cet « art nègre » si chéri des Dadas et autres Surréalistes, Picasso compris. Une honte résultante d'une absolue incompréhension du continent africain, de ses richesses créatives et artistiques. Voici pourquoi et comment, en quelques citations reprises à Maureen Murphy :
- "Les arts d'Afrique ne sont ni primitifs, ni premiers. Tradition et modernité sont des constructions historiques. Les arts d'Afrique, d'Océanie et des Amériques n'ont rien en commun si ce n'est le fait d'avoir été regroupés en un même lieu, pour incarner une perception eurocentrée de l'altérité. Évitez l'approche ethnique, privilégiez l'approche historique même si dans les faits et dans les salles, vous verrez des objets classés dans un présent atemporel qui ne rend aucunement compte de l'historicité des communautés, de leur mobilité, ou de la complexité de leurs histoires. L'art dogon, bambara ou sénoufo n'existent pas. // J'aimerais affirmer aussi, de concert avec Vumbi-Yoka Mudimbe (The invention of Africa: gnosis, philosophy, and the order of knowledge, Bloomington: Indiana University Press, 1988), que l'art africain n'existe pas en tant que représentation globale. C'est une construction historique, au même titre que l'idée d'Orient, mais qui, étonnamment, n'a pas fait l'objet d'un investissement critique similaire. " (p. 28)
- "J'étais convaincue qu'il fallait banaliser l'Afrique pour ouvrir les yeux, instaurer l'égalité pour déjouer les stéréotypes, toujours comparer pour comprendre et aller au-delà de la fascination provoquée par des étiquettes telles que tribal, animiste ou sans écriture. Les arts populaires ne sont pas le propre des primitifs. L'artisanat n'est pas le propre de l'Afrique. Le continent n'a jamais été replié sur lui-même, comme en atteste les objets. Or, contrairement à d'autres régions du monde (l'Amérique du Sud ou la Chine, par exemple), les arts d'Afrique furent systématiquement taxés de primitifs. [...] La partition entre une Afrique noire et animiste et une Afrique blanche et musulmane est bien trop simpliste. Elle continue pourtant de façonner nos approches, les rares enseignements qui sont consacrés à ce continent, ainsi que les collections des musées et les expositions qui s'y rapportent." (p. 30-31)
- "En Histoire de l'art, la question ne se pose même pas: l'histoire coloniale fait figure de grande absente, souvent rattrapée d'ailleurs par le contemporain. De plus en plus d'artistes puisent en effet dans ce monde des images pour questionner les rapports entre passé et présent. [...] L'effet d'étrangeté, voire de grotesque provoqué par ce procédé court-circuite le rapport au temps pour mieux faire ressortir le paternalisme, l'esprit de supériorité, la domination des corps." (p. 70-71)
On lira également avec intérêt et étonnement l'ouvrage dirigé par Nicolas Bancel, Pascal Blanchard et Gilles Boëtsch, Sexe, race et colonies. La domination des corps du XVe siècle à nos jours (Paris : La Découverte, 2018), un classique quasi introuvable ou hors de prix, mais qui a le mérite de mettre en images (et quelles images !) la réalité brute des faits d'un monde qui persiste et signe à nier que l'Afrique n'est pas un continent uniforme et globalisé, mais un ensemble de 54-55 pays délimités arbitrairement par les « bons Blancs » à Berlin en 1885, pays qui tous avaient des cultures artistiques différentes avant cette date et qui tous, aujourd'hui, développent leur propre culture, leurs propres arts, leur propre créativité.
La fin de la Pax Americana lancée en début d'année par la bêtise crasse d'un fils à papa looser nommé Donald Trump aura-t-elle pour effet positif un regard enfin véritable sur ce qu'est l'Afrique et son histoire ? On l'espère. Malheureusement, avec des von der Leyen ultra-néo-libérales au pouvoir ou, pire encore, avec la montée des fascismes et des populismes de par le monde, rien n'est moins sûr. Aussi, aux Africaines et aux Africains de prendre enfin leur destinée en main et d'écrire LEUR HISTOIRE, celle passée tout autant que celle à venir ! Et le Cabo Verde n'y échappe pas.
Christophe Chazalon
Genève, le 24/03/2025
Elisa Pinheiro (PAICV): enfin une politique au Cabo Verde qui ne ment pas, mais qui agit (2025)
Comme nous l'avons déjà écrit à plusieurs reprises depuis que ce site web existe, bien que le Cabo Verde ait une loi qui impose un salaire minimum, nombre de salarié(e)s touchent un salaire inférieur. Et pire encore, les câmaras municipales elles-mêmes ne paient pas le salaire minimum à de nombreux employé(e)s, pas plus que la couverture sociale obligatoire de l'INPS (santé et prévoyance vieillesse). Une véritable honte s'il en est.
L'ancien président de câmara MpD, Anibal Fonseca, qui a tenu la câmara municipale de Porto Novo durant 8 années, avait avoué ce non-respect de la loi à plusieurs reprises. Mais la réalité est encore pire. Non seulement les employé(e)s étaient sous-payé(e)s, mais en plus, l'exécutif dirigé par Fonseca laisse une ardoise de plus de 1,18 million d'euros (130 mil contos) auprès de l'INPS.
De son côté, Orlando Delgado, ancien président MpD de la câmara municipale de Ribeira Grande de Santo Antão avait expliqué que si son équipe avait dû appliquer la mesure (à l'époque, 15'000 escudos de salaire minimum), elle aurait dû licencier 60% des travailleurs du secteur de l'assainissement.
Dans la plupart des pays, sauf peut-être à Marseille, en France, les personnes qui travaillent dans le domaine de la propreté et de l'assainissement sont les laissés-pour-compte du système, les pauvres qu'on sous-paie parce que de toute façon ils ne se plaignent pas, heureux déjà d'avoir un travail. C'est du moins ce qu'estiment celles et ceux qui les emploient. Or, ce sont bien eux qu'il faut aider en priorité et soutenir avec vigueur, car tout justement ce sont les plus démunis, les plus nécessiteux, les plus précaires, et encore une fois, généralement des femmes.
Alors, est-ce vrai que les présidents MpD ne pouvaient rien faire pour payer le salaire minimum obligatoire et légal à leurs travailleurs les plus bas dans les échelons des salariés de la câmara municipale qu'ils dirigeaient ? Preuve est aujourd'hui faite que non. Tout est question de priorité, comme le montre à merveille Elisa Pinheiro, un nom à retenir.
Sa décision est très clairement une décision hautement politique, mais c'est aussi très clairement une décision à but social majeur. Elle vise à soutenir les plus pauvres des travailleurs de l'administration publique, mais aussi à respecter le cadre légal, un des piliers fondateurs de toute démocratie. Si la loi dit : tout employeur doit payer le salaire minimum à la personne qu'il emploie, l'employeur doit le faire et plus encore, ce qui n'a pourtant jamais été le cas, l'État, par l'entremise de son Ministère du Travail, doit effectuer des contrôles et imposer aux délinquants contrevenants et alii de respecter la loi. Mais l'État, dirigé depuis 2016 par le Premier Ministre MpD, notre cher Ulisses Correia e Silva, avait semble-t-il d'autres chats à fouetter plus importants que ses confrères présidents MpD de câmara municipale, n'est-ce pas ? Oups ! Cherchez l'erreur.
Mais est-ce que cette annonce est une annonce à la cabo-verdienne, à la MpD oserais-je dire ? On annonce et puis, pfffuit ! Plus rien. Non ! Les salaires seront même augmentés rétroactivement sur les deux premiers mois de l'année. Une gageure. Et les employé(e)s concerné(e)s peuvent, elles, dire que 2025 est une bonne année : un salaire doublé et une assurance maladie garantie pour tous les membres de la famille. Bravo Mme Pinheiro ! Enfin des bonnes nouvelles dans ce monde malade.
On peut toutefois se demander comment cela est possible, car une telle décision a un coût et pas des moindres. La présidente de la câmara de Porto Novo a estimé ce surcoût à 9 100 euros (1 000 contos) par mois, une somme conséquente pour une câmara municipale cabo-verdienne, au budget 2025 estimé à 5,44 millions d'euros (600 mil contos), d'autant plus "que le Fonds de financement municipal (FFM), inclus dans le budget de l'État de cette année, ne couvre pas ce qui est réglementé dans le nouveau Plan de postes, fonctions et rémunérations (PCFR) en ce qui concerne ces travailleurs (que o Fundo de Financiamento Municipal (FFM), contemplado no Orçamento do Estado para este ano, não cobre o regulamentado do novo Plano de Cargos, Funções e Renumerações (PCFR) no que respeita a estes trabalhadores.)." Vous savez, ce merveilleux PCFR retoqué par le Président de la République (web), José Maria Neves, mais finalement imposé par force par notre cher Ulisses (web), et dont une partie des professeur(e)s ne veut toujours pas.
Alors comment réunir une telle somme ? La réponse est offerte, non sans causticité, par Carlos Bartolomeu, secrétaire permanent du Syndicat libre des travailleurs de Santo Antão (SLTCA) qui lutte depuis des années pour que cette décision soit prise. "En réduisant le 'gras' et en améliorant les services de collecte municipaux, il est possible de mobiliser nos propres ressources (“Cortando em algumas ‘gorduras’ e melhorando os serviços de arrecadação municipal, é possível mobilizar recursos próprios”, defende o dirigente sindical, numa alusão a gastos com gabinetes, viagens e alojamentos não prioritários)", affirme-t-il à A Nação, en faisant référence aux dépenses de bureau, aux voyages et aux logements non prioritaires. On y croit sans difficulté
En conclusion, un grand bravo à Elisa Pinheiro, très rare femme, pour ne pas dire trop rare femme à être à la tête de l'exécutif au Cabo Verde, ce qui est regrettable, car s'il y avait plus de femmes à la tête des exécutifs de l'archipel, le peuple pourrait peut-être enfin manger à sa faim et vivre sainement, avec encore moins de stress ! Mais Ulysses n'ayant pas fait un long voyage comme son homonyme, il reste figé dans sa vision patriarcale et réactionnaire d'un nombril trop égocentré. En novembre 2019, il se targuait de la votation positive sur la nouvelle loi sur la parité, annonçant clairement sur le site web du gouvernement (voir photo ci-dessous) : "Le Cabo Verde franchit une étape historique et se positionne comme l'une des démocraties les plus égalitaires au monde - Ulisses Correia e Silva (Cabo Verde dá um passo histórico e posiciona-se como uma das democracias mais igualitárias do mundo - Ulisses Correia e Silva)". (web) Ce n'était que du bluff et le monde ne s'y est pas trompé. En juin 2024, le Cabo Verde dévisse de 4 places dans l'Indice global sur la parité, soit en 41e position au niveau mondial et 6e pour l'Afrique subsaharienne. (web) Non content de cela, le gouvernement MpD, par l'entremise de son ministre de la Famille, se dit "insatisfait" de ce classement. La faute à qui ? Pas au gouvernement bien sûr. La faute à, nous citons, "la parentalité irresponsable, une des principales raisons de l'inégalité entre les hommes et les femmes". (web) Encore du bluff, du pipeau, du blabla politicien sauce MpD, rassurez-vous ! Pourquoi ? Pour deux raisons majeures et indiscutables : le MpD, au contraire du PAICV, n'a présenté... AUCUNE femme pour les présidences de câmara municipale lors des dernières élections. Cela pourrait être suffisant en soi. Mais non, notre cher Ulysses a fait pire depuis, eh oui ! Et il a clairement montré qu'il prend les électrices et les électeurs, et le reste des habitants du Cabo Verde pour des imbéciles. Lors de son remaniement ministériel en début d'année 2025, le Premier ministre a viré la quasi-totalité des femmes de son gouvernement pour les remplacer par... des hommes (dans 10 ans, il aurait choisi pour sûr des robot de Musk). Plus encore, il a expliqué (on n'y croirait pas tellement c'est beauf !) que la loi sur la parité qu'il a lui-même fait voter ne s'applique pas au gouvernement. Ses mots exacts sont : "Je dois expliquer que la loi sur la parité s'applique aux organes élus. Il n'existe pas de loi sur la parité concernant les organismes ou structures gouvernementaux, ou autres personnes directement nommées (Preciso explicar que a lei de paridade aplica-se aos órgãos eleitos. Não há lei de paridade relativamente a órgãos ou estruturas governamentais, ou outras que sejam de nomeação direta)". (web) Nous, on osera un troisième "cherchez l'erreur" ! D'une part, cela montre la totale mauvaise foi d'Ulysses Correia e Silva de manière évidente. S'il a effectivement raison, à plus forte raison il doit donner l'exemple et montrer à travers la nomination de ses ministres qu'il est pleinement pour la parité homme-femme ; s'il ne le fait pas (et il ne l'a pas fait), il crache sur SA PROPRE LOI. Mais pire encore, par cette assertion selon laquelle il insiste sur le fait qu'il n'y ait pas de loi sur la parité pour les personnes nommées dans un exécutif, il montre à quel point il a tort et qu'il n'a pas respecté la loi cette fois, pour le coup, concernant les élections municipales. Car les élections municipales, CE SONT des ÉLECTIONS, pas des nominations. Donc il devait en tant que chef du MpD imposer le respect de SA loi, ce qu'il n'a pas fait. Conclusion : la parité pour le Premier ministre du Cabo Verde, ça ne vaut rien. En parfait masculiniste (une tendance très actuelle il faut dire, à la mode chez certains groupuscules), l'homme dirige, la femme fait le reste, autrement dit... tout (ou presque, les enfants nécessitant encore père et mère pour naître au monde et ça, les hommes MpD savent bien faire) !
Aussi, nous, on n'est clairement pas d'accord et on maintient que les prochaines élections législatives verront une progression fulgurante du PAICV, à défaut d'un revirement drastique de la politique du MpD mené par notre cher Ulysses, et, on l'espère, des femmes au pouvoir ! Les vieux schnocks à la Trump (78 ans), Poutine (72 ans), Netanyahou (75 ans), Khamenei (85 ans), and Co qui tardent, malheureusement pour l'Humanité, à mourir (ou du moins à prendre leur retraite anticipée) et qui pourrissent la vie des gens, détruisent le monde avec leurs visions passéistes et rétrogrades, leur goût du pouvoir, de l'argent sale et des coups tordus, incapables d'évoluer, trop vieux pour suivre la théorie de Darwin. La Nature, les aurait déjà classé depuis belle lurette. Aussi, on ne le répétera jamais assez, une bonne fois pour toutes : place aux jeunes qui ont des idées, qui ont des rêves, qui ont un avenir, eux. Place aux femmes, car des femmes au pouvoir, c'est une chance plus grande d'avoir un monde plus serein, plus sûr, plus... efficace ! On le voit tous les jours à la maison, n'est-ce pas ? Qui cuisine mieux que maman ? Papa ?

Nouveauté
Pierre-Joseph Laurent
A crioulização: a invenção de Cabo Verde
Praia: Livraria Pedro Cardoso
2024