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"N'oubliez pas vos doutes... Méfiez-vous! L'esprit de celui qui croit est un esprit qui stagne.  Il ne se développe pas vers l'extérieur, dans un univers infini."

Frank Herbert, Les hérétiques de Dune

 AVERTISSEMENT
Vous pouvez retrouver l'ensemble de nos "post it" antérieurs en cliquant ICI ou sur la page dédiée au Cabo Verde de notre site personnel www.chazalonchristophe.com.
Bonne lecture à toutes et à tous!
Christophe Chazalon

Cabo Verde: Ulisses Correia e Silva, adorateur des prisons pleines (2023)

On l'apprend aujourd'hui, le Cabo Verde compterait pas moins de 2'100 détenus dans ses prisons, au niveau national.
Qu'est-ce à dire? Petite réflexion sur la politique MpD d'Ulisses Correia e Silva et la criminalité dans l'archipel.

La ministre de la Justice, Joana Rosa, a annoncé, ce 18 septembre 2023, que le pays connaissait une augmentation de... 34% de ses détenus depuis le dernier recensement effectué.
Pour être plus précis, il y en avait 1'328 en 2013, 1'537 en 2018 et donc 2'100 en 2023, le tout réparti dans 5 prisons régionales et 2 centrales. Parmi ces deux dernières, celle de Praia, la plus importante du pays, comprenait pas moins de 1'100 individus, soit plus de la moitié des prisonniers totaux.

Mais avant d'aller plus loin, on relèvera l'assertion de la ministre suivant laquelle, on cite, "Temos de trabalhar, enquanto poder público, para reduzir o número dos reclusos". Elle ajoute encore que la prison ne pénalise pas seulement les détenus (oubliant leur famille au passage, encore plus pénalisée), mais indique que "les autorités publiques ont également échoué". (web)
Que dire, ma foi, face à ce constat accablant? Nous avons déjà écrit cette année sur la criminalité au Cabo Verde, sur la politique désastreuse du gouvernement MpD en activité depuis 2016, sous le pilotage de notre Cher Ulisses, et également sur les solutions à apporter.
Mais voilà, Ulisses est Ulisses et n'écoute que sa propre parole, divine, absolue et toujours la plus juste. Alors les prisonniers dans les prisons cabo-verdiennes pullulent comme les lapins en Australie, à toute vitesse (24 lapins importés au XIXe siècle et 163 ans plus tard... plus de 300 millions)!  (web)
Et pourquoi me direz-vous?
Parce que la politique d'Ulisses et de son gouvernement est purement répressive. Les lois mises en place au Cabo Verde sont de plus en plus coercitives et punitives, et trop rarement préventives. Le gouvernement préfère dépenser 48'000 contos (soit 436'000 euros) dans l'achat de voitures pour la police que de les investir dans la formation des jeunes en échec scolaire par exemple. (web)
Alors que la pandémie de Covid-19 a fait tanguer violemment l'économie du pays fortement basée sur le tourisme (25% du PIB), le bateau a failli sombrer, car au final le plus grave n'était pas la pandémie en elle-même, mais les conséquences de cette dernière, à savoir la hausse de la pauvreté et le retour de la faim dans l'archipel. Or, des ventres qui ont faim ne s'intéressent pas à la loi. Ils cherchent surtout et avant tout de quoi survivre. Intensifier la répression à tout crin comme l'a fait et continue de le faire le gouvernement MpD ne fait donc que renforcer le nombre de détenus. Le MpD peut accuser le PAICV, comme il le fait toujours quand les chiffres ne sont pas bons, le fameux "ce n'est pas notre faute, c'est celle de nos prédécesseurs", pure politique politicienne stupide et inutile pour améliorer les conditions de vie de la population, mais les chiffres sont parlants. En 2018, le MpD était en place depuis 2 ans et majoritaire (absolu) à l'Assemblée nationale. Il avait donc tout pouvoir. Résultat: 563 détenus supplémentaires. La ministre de la Justice actuelle peut donc clairement affirmer "que les autorités publiques ont échoué". C'est un beau mea culpa qui n'attend que le démentir du grand Vizir Ulisses!
La question reste: mais que vont-elles faire maintenant ces autorités publiques, d'autant plus si elles entendent réduire le nombre d'incarcérés comme le promet la dite ministre?

Une politique judiciaire MpD accablante ou la politique de déni d'Ulisses Correia e Silva
Les chiffres une fois encore sont éloquents, mais peut-être pas suffisamment pour que les lectrices et les lecteurs de ce post it saisissent bien l'énormité qu'ils portent en eux.
Faisons une petite comparaison toute simple:

Population globale 2023
  • Cabo Verde:  491'233 habitants (dans l'archipel - INE) - web
  • France: 68'042'591 habitants (métropole - chiffre INSEE) - web
Population carcérale 2023
  • Cabo Verde: 2'100 détenus (dans l'archipel - Ministère de la Justice) - web
  • France: 87'197 détenus (métropole - INSEE?) - web
Ratio population carcérale 2023 (pour 100'000 habitants)
  • Cabo Verde: 427
  • France: 128
Avec ce ratio, le Cabo Verde fait parti des pays au plus haut taux d'incarcération au monde, en 2023. Dominé par le Salvador (1'086 prisonniers pour 100'000 habitants), suivi de Cuba (794), du Rwanda (621), du Turkménistan (576), des USA (531), de Panama (499) etc. Avec des chiffres légèrement inférieur début 2023, la France (106) arrivait alors au 141e rang mondial, ex aequo avec Hongkong et le Luxembourg. (web)
Ce qui est encore plus critiquable, c'est que si pour la France, la population globale augmente donc peut expliquer en partie une augmentation des détenus, pour le Cabo Verde, la population diminue entre le recensement de 2010 et celui de 2021, donc la population carcérale ne devrait-elle pas s'infléchir elle aussi, même un tout petit peu?
Et que dit le gouvernement d'Ulisses? Là, on rigole (jaune, mais c'est quand même un rire). Le ministre de l'administration interne, Paulo Rocha, déclarait haut et fort le 1er mars 2023, que "la criminalité dans le pays est stable"! Ni plus ni moins. (web) Alors pourrait-on nous expliquer comment il se peut que la criminalité dans le pays soit "stable" alors qu'en l'espace de 5 ans (2018-2023), la population carcérale augmente de... 34%? A ce niveau là, ce n'est plus de la politique politicienne, mais de la politique de déni. Affirmer des affirmations fausses, taire volontairement la vérité, cacher les faits concrets à la population, pour maintenir une bonne image du pays et plus encore glorifier la politique du gouvernement en place, alors que celle-ci est désastreuse! Bravo M. Ulisses. Cette politique de déni est normalement réservée aux gouvernances autoritaires ou dictatoriales. Serait-ce l'influence de l'amitié caboverdiano-chinoise, renforcée depuis deux ou trois ans? Vous ne le saviez peut-être pas, mais le Parti communiste chinois (PCC) n'hésite pas à payer des "publicités" dans les journaux caboverdiens pour dire "Tout va bien en Chine!", comme ce fut le cas cette semaine encore dans l'hebdomadaire Expresso das ilhas. Le consul chinois au Cabo Verde y vantait "l'excellente" santé de l'économie chinoise qui se portait à merveille. Toute opinion contraire est purement malveillante, n'est-il pas? Or, les chiffres disent absolument tout le contraire: le chômage des jeunes explosent en Chine (près de 30%), le moral des ménages est en berne totale et l'immobilier s'effondre, risquant de provoquer une crise financière mondiale. Alors qui a raison: les chiffres ou le PCC? Ah, mais est-on bête! Le PCC a supprimé les chiffres sur le chômage des jeunes, sur le moral des ménages et sur tant d'autres points négatifs. Donc pas de chiffres, pas de problèmes. Tout est résolu. Et donc: "Tout va bien!" CQFD!
De son côté, Ulisses adore les classements mondiaux et quand le Cabo Verde figure dans le groupe de tête (voir nos précédents post it). Aussi, avec les prisons, force est de constater qu'il a encore une fois réussi. La Cabo Verde est bien dans le groupe de tête!

Un système carcérale caboverdien aux limites de l'implosion.
On l'a vu, la politique du MpD est la principale fautive de cette épidémie carcérale, parce que tournée vers la macroéconomie et non vers la population et ses besoins, ses souffrances. Le but d'Ulisses Correia e Silva est de garder et renforcer à l'international l'image d'un pays stable et bien noté pour obtenir les subsides de la Banque mondiale, du FMI et consors. C'est certes un aspect à ne pas négliger pour le développement du pays. Mais à trop fermer les yeux sur ce qui se passe dans le pays, pour la population dont environ un tiers à faim et vis dans la pauvreté, voire l'extrême pauvreté, on finit par saturer les prisons.
Le site du World Prison Brief  (web), nous apprend autre chose d'essentiel. Les chiffres proposés sont pour l'essentiel ceux de 2018.
Non seulement en 5 ans, on est passé d'un ratio de 296 (2018) à 427 (2023), mais plus encore en 2017, le chiffre officiel de capacité des 5 prisons caboverdiennes étaient de 1'410 places, alors que l'année suivante on dénombrait déjà 1'549 individus incarcérés.
Qu'en est-il en 2023? La situation est simplement catastrophique.

Conclusion
On ne le répétera jamais assez: la solution principale face à la criminalité, c'est la prévention, et plus encore l'éducation. Il ne sert à rien de faire des lois punitives et coercitives, et d'incarcérer toujours plus de personnes, surtout lorsque la situation économique d'un tiers de la population est misérable. En février 2023, on estimait que 176'000 personnes vivaient au seuil de pauvreté au Cabo Verde, soit 35,2% de la population, et 54'395 vivaient dans l'extrême pauvreté, soit 10,6% de la population. (web) Le travail à effectuer est colossal pour rétablir un semblant d'équilibre et redonner de la dignité aux plus indigents. Dans un pays où près de la moitié de la population à moins de 25 ans, la solution passe par l'éducation, l'augmentation des formations, mais également par l'augmentation des possibilités de distractions culturelles ou sportives (comme on l'a écrit il y a quelques mois!). Cela a certes un coût, mais un individu en prison en a aussi un. Et 2'100 individus encore plus. En fait, on ignore quel est ce coût d'un prisonnier au Cabo Verde, aucun chiffre n'étant donné par le ministère ou par l'INE à ce sujet. Il est préférable politiquement de ne pas trop attirer l'attention sur ce sujet. En France, on estime qu'un prisonnier coûte dans les 32'000 euros par an (en général, le coût dépendant du type de prison), ou entre 100 et 200 euros par jour, "tout compris". (web) Au Cabo Verde, le coût doit être fortement inférieur si on considère que le SMIC français est à 1'747 euros par mois pour 35 heures / sem. et que le revenu minimum caboverdien est à 127 euros (14'000 escudos cv) pour 48 heures / sem. (excepté pour les nantis de l'administration publique, les employés de banque et les assurances qui ne travaillent que 40h / sem.  avec un salaire au minimum trois fois le salaire de base, pour une juste équité entre les classes sociales évidemment, sinon les pauvres s'ennuieraient). (web)
Au final, on peut dire que le gouvernement d'Ulisses Correia e Silva a du pain sur la planche pour suivre la proposition de sa ministre de la Justice, à savoir de "réduire le nombre de détenus", s'il ne modifie pas et sa politique répressive en matière de criminalité, et ses lois tout fraîchement votées durant ses 2 mandats, en privilégiant avant tout la formation des jeunes.
Dans le cas contraire, nul doute que le système court à la catastrophe.
Et les premiers à en souffrir seront les Caboverdiennes et les Caboverdiens!

Christophe Chazalon
Genève, le 20/09/2023

Merci à toutes et tous!

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